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Nono revient du Shandong, un mois avant le mariage. Un week-end de préparatifs, de réservations de restaurant et d’hôtel, de choix de fleurs et de coiffure. Elle a engagé deux entreprises d’organisation de mariage, une dans le Shandong, et une à Pékin. Avec l’entreprise pékinoise, elle a fait faire des robes, elle a choisi le restaurant, elle a donné des plans de table.
Le choix de la robe a été soumis à l’avis de sa mère qui refusait catégoriquement que le qipao qu’elle faisait tailler soit aussi échancré derrière. La négociation a abouti à un décolleté arrivant au milieu du dos.
Au final, elle a choisi 5 robes, sans savoir vraiment laquelle elle porterait à quel moment du mariage. La robe de mariée blanche sera pour la cérémonie dans le Shandong, la robe de bal bleue pour le mariage à Pékin. En ce qui concerne les trois autres qipao, elle verra plus tard comment elle les utilisera.
Dans le Shandong, les décisions sont plus difficiles à prendre. En plus de respecter la volonté de ses parents, elle doit respecter les traditions de la campagne et les traditions spécifiques au Shandong, la volonté de ses beaux parents et les caprices des wedding planners du coin. Les volontés s’opposent, le ton monte. Elle est trop moderne dans ce monde de traditions, trop influencée par l’Occident pour ces vieux Chinois patriotes. Quelques tensions avec son futur époux, qui hésite entre s’en ficher complètement ou prendre partie pour les traditions de sa ville natale. Elle veut des fleurs blanches ? c'est impossible. Un livre d’or pour que les invités émargent ? Ça ne s’est jamais vu dans le Shandong. Une cascade de Champagne ? Ce n’est pas traditionnel. Une robe rose pour la demoiselle d’honneur ? Il va falloir vérifier que ce n’est pas contraire aux traditions, car le rouge et le blanc sont formellement interdits. J’ai finalement droit à ma robe rose.
Avoir une témoin occidentale fait quand même tiquer tout le monde. Ce n’est pas stratégique, il ne faut surtout pas que la demoiselle qui accompagne la mariée soit plus belle que la mariée. Les organisatrices la mettent en garde : « Plus personne ne va vous regarder, tous les yeux seront braqués sur l’étrangère ! » Ça ne me dit rien qui vaille, Nono tient bon. La bataille est féroce, la mariée contrariée doit céder du terrain sur de nombreux points. Rien ne doit être innovant, surtout pas original, et en aucun cas différents des habitudes du Shandong. « Mais c'est ton mariage ! » Elle me regarde en acquiesçant. - C'est ce que je leur ai dit. Et tu sais ce qu’on m’a répondu ? « Un mariage, ce n’est pas le mariage pour la mariée, c'est une mise en scène qu’elle offre à ses invités. C'est comme tourner un film : il faut que le public comprenne, qu’il trouve ça beau. Tu ne peux pas choisir uniquement ce qui te fait plaisir. »